Bibliographies

Lévi-Provençal, Évariste (1894-1956)

*Chef de file de l'islamologie française, Evariste Lévi-Provençal est né à Alger le 4 janvier 1894. Après de solides études classiques au lycée de Constantine, il entreprend des études supérieures à l'Université d'Alger où deux de ses maîtres, René Basset et Jérôme Carcopino, le marquent assez pour le faire hésiter entre l'orientalisme et l'étude des Antiquités romaines en Afrique du Nord. * À la fin de sa licence, la première guerre mondiale l'interrompt dans ses études. Grièvement blessé aux Dardanelles, il est évacué sur Alexandrie. En 1916, il se rend, après sa guérison, au Maroc qui recherche des arabisants pour les affecter aux Affaires indigènes. Il rejoint le poste militaire d'El-Kelaa des Sless, dans la vallée de l'Ouergha, aux confins du Rif. Outre ses devoirs militaires, il cherche à découvrir tous les aspects de son environnement socioculturel, s'affermissant ainsi dans sa vocation d'arabisant. * Démobilisé en 1920, il est affecté à Rabat à l'Ecole supérieure de langue arabe et de dialectes berbères qui devient, en 1921, l'Institut des Hautes Etudes Marocaines. Membre d'une jeune équipe venue renforcer les premiers chercheurs français au Maroc, il se consacre pendant deux ans à deux thèses: la principale, "Les Historiens des Chorfa", suggérée par René Basset, l'initie à la bibliographie arabe, le faisant réfléchir à la suite d'Octave Houdas à l'historiographie maghrébine; la thèse secondaire, "Textes arabes de l'Ouergha", lui permet de compléter ses études dialectologiques et d'approfondir sa formation de philologue, inspiré par les travaux de William Marçais. Il est alors promu Docteur ès lettres à 28 ans, avec ces deux premiers travaux soutenus devant ses maîtres à la Faculté d'Alger et publiés dès 1922. * En 1923, alors qu'il n'a pas encore décidé de son orientation, il se voit confier par le Ministère de l'Instruction publique une mission pour établir le catalogue des manuscrits arabes de théologie, de géographie et d'histoire ayant appartenu à la bibliothèque du Sultan saadien Moulay Zidan et conservés à l'Escurial de Madrid. Il se passionne pour l'identification des manuscrits et pour des liasses de textes qu'il publie sous le titre: "Documents inédits d'histoire almohade". Pendant ce séjour en Espagne, il s'adonne au relevé assidu des inscriptions arabes, collecte qu'il continue au cours d'une mission avec Henri Terrasse en 1924. Nommé directeur de l'Institut des Hautes Etudes Marocaines en 1925, il se livre à diverses études sur le Maroc, dont Chella: une nécropole mérinide, faite en collaboration avec Henri Basset. Il entreprend alors de se tourner vers l'histoire d'al-Andalous. Il met à jour et réédite "l'Histoire des musulmans d'Espagne" de Reinhardt Dozy. Une documentation de plus en plus poussée, l'approfondissement de ses recherches et la découverte du texte Mémoires d'un compagnon d'Ibn Toumert, le conduisent à soutenir la thèse que l'histoire de la Berbérie et de l'Espagne constituent un tout jusqu'au XIIIe siècle, l'Espagne jouant, selon lui, un rôle capital entre les Xe et XIe siècles. * À partir de 1928, la péninsule Ibérique devient, pour Evariste Lévi-Provençal, l'objet principal de ses recherches. Il s'investit dans deux disciplines qu'il considère comme inséparables et qu'il mène de front, c'est-à-dire l'étude de la langue arabe et celle de l'histoire de l'Occident musulman au Moyen Age. Réceptif à la nouvelle historiographie française qui prend en compte les aspects sociaux et économiques, il publie en 1932 l'Espagne musulmane au Xe siècle dans laquelle il privilégie l'étude des institutions et de la vie sociale à l'histoire événementielle. La Faculté des Lettres d'Alger lui propose, en 1935, une chaire qui va le libérer des tâches administratives qu'il a au Maroc. Pendant deux ans, il assume ces fonctions en Algérie et effectue de nombreuses missions en Egypte. Il y donne des cours en 1938, à la Société Royale de Géographie du Caire. * En 1940, suspendu de ses fonctions à l'Université d'Alger, il est rattaché nominalement à la Faculté des lettres de Toulouse, années sombres qu'il emploie à la rédaction du premier tome de son "Histoire de l'Espagne musulmane". En 1944, il est Chargé de Conférences à la Sorbonne à la chaire que l'Université créée pour lui. Sous son impulsion et avec l'aide de ceux qu'il sait intéresser à cette œuvre, l'enseignement des matières islamiques va prendre une place éminente. L'Institut des études Islamiques va recevoir son organisation définitive. Le Centre d'études de l'Orient contemporain, fondé à Alger avec l'aide du professeur Robert Montagne, l'accompagne à Paris et connaît une vitalité qui déconcerte les plus sceptiques. Sur son initiative et celle d'Henri Massé ainsi qu'avec le concours du professeur Charles Pellat qui lui succède à la tête de cette entreprise, la seconde édition française de l'Encyclopédie de l'Islam est mise en chantier. Invité par la Faculté du Roi Farouk 1er d'Alexandrie, il donne en 1947 et 1948, une série de conférences magistrales sur les villes andalouses, notamment sur Grenade et l'Alhambra, ainsi que sur la poésie arabe andalouse, c'est-à-dire la qacida, le muwachah et le zadjal, montrant les rapports qu'elle entretient avec la poésie européenne de la même époque. En 1954, il fonde la revue Arabica, donnant ainsi aux études arabes un moyen d'expression en rapport avec leur importance. C'est de main de maître qu'il coordonne toutes ces charges. Il ne ménage pas ses efforts, répondant aux multiples sollicitations scientifiques qu'il reçoit. Devant un état de grand surmenage qu'accentue le rythme parisien, son médecin le contraint au repos. Il supporte difficilement cet arrêt forcé, tant il est passionné par ses activités. Alors qu'il espère voir ses forces revenir, il est brutalement emporté par une crise cardiaque, le 27 mars 1956, laissant un immense vide auprès de ses innombrables amis, collègues et étudiants. **Editions et traductions de textes arabes :**"Séville musulmane au début du XIIe siècle": le Traité d'Ibn Abdoun sur la vie urbaine et les corps de métiers, traduction et notes, Paris, Librairie G.P. Maisonneuve, 1947*
*"Extraits des Historiens arabes du Maroc." Textes d'explication à l'usage des étudiants, Paris, Larose, 1924 / 2e éd. 1929? / 3e éd. 1948?*
*"Un nouveau texte d'histoire médiévale : le "Musnad" d'Ibn Marzûk", Paris, Larose, 1925*
*"Le Sahîh d'al-Buhârî". Reproductions en phototypie de la recension occidentale dite "recension d'Ibn Sa'âda" établie à Murcie en 492 de l'hégire (1099), Paris, Geuthner, 1928*
*"Documents inédits d'histoire almohade". Fragments manuscrits du "legajo" 1919 du fonds arabe de l'Escurial, Trad. avec une introd. et des notes, Paris, Geuthner, 1928*
*"Le Kitâb al-bayân al-mugrîb d'Ibn 'Idarî al-Marrâkushî" (Histoire de l'Espagne musulmane au XIème siècle), Paris, Geuthner, 1930.* (Reproduit de Camélia Sobhi, "Bibliographie des ouvrages traduits de l’arabe vers le français", Le Caire, Imprimerie de la Bibliothèque et archives nationales d’Égypte, 2003. Ouvrage sur cette archive.)