Bibliographies

Boucher, Émile (1908-1973)

*Né à Rogersville (Nouveau-Brunswick), M. Boucher avait fait ses études classiques à l'université de Bathurst, qui lui décernait un baccalauréat ès arts en 1930. Il enseignait ensuite pendant un an à son "Alma Mater". Comme c'est le cas souvent de ceux qui sont d'origine modeste, M. Boucher aimait le travail et l'étude, et était désireux de meubler son esprit d'autant de connaissances possibles et d'acquérir une formation solide. C'est pourquoi, après sa sortie de l'université, il poursuit ses études. ** Il a mis en pratique cette pensée du maréchal d'Aguesseau: "Vos classes sont terminées; vos études commencent." Pendant quatre années, il suit les cours par correspondance de l'université La Salle, de Chicago, et obtient le diplôme supérieur en comptabilité (DHA), en 1934. Installé dans la métropole québécoise, il en profite pour suivre des cours à l'université de Montréal, de 1934 à 1938; ces études lui valent deux diplômes: la licence en sciences sociales, économiques et politiques, en 1936, et la licence en philosophie, en 1938. Toutes ces études l'avaient préparé à la carrière qui devait être celle de toute sa vie, la traduction. ** C'est en 1938 qu'il débute dans la fonction publique, à Ottawa, comme traducteur parlementaire. Il exerce sa nouvelle profession à titre de traducteur des débats de la Chambre des communes et du Sénat pendant dix ans, et de traducteur des lois pendant six ans. En 1946, il fait un stage à Londres où il est délégué par les Nations Unies comme traducteur à la conférence préparatoire à l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce. Travailleur acharné, il suit par correspondance les cours de droit de l'université La Salle, de Chicago, de 1949 à 1952, et fait les stages nécessaires dans les études d'avocats; ces cours lui valent le titre de bachelier en droit (LL.B) et l'honneur d'être reçu avocat et de devenir membre du Barreau du Nouveau-Brunswick. ** En 1954, il est nommé chef du service de traduction au ministère du Commerce, et occupe ce poste pendant dix ans. Il passe, en 1964, au Conseil économique du Canada où il organise un service de traduction et forme une équipe de traducteurs. ** On le retrouve, en 1971, à l'université d'Ottawa, qui l'avait invité à prendre la direction de la nouvelle École de traduction. Il en est, en réalité, le fondateur, et sous sa direction sage et éclairée, l'École s'établit avec des structures rationnelles et connaît des progrès remarquables. Ajoutons qu'il était, depuis 1965, chargé d'un cours de traduction à cette même institution. Atteint d'un mal incurable, il avait dû démissionner de son poste de directeur quelques mois avant son décès. ** M. Boucher avait consacré trente-cinq années de sa vie à la carrière de la traduction. Dans tous les postes qu'il a occupés, il s'est fait remarquer par sa haute compétence professionnelle et par un don inné pour l'administration. Il a été l'un de ceux qui ont guidé les premiers pas de la Société des traducteurs et interprètes du Canada, l'ancienne Association technologique de langue française d'Ottawa qu'il s'agissait de réorganiser pour lui permettre de répondre plus efficacement aux besoins nouveaux de la profession de traducteurs. En assumant cette tâche, M. Boucher se trouvait par le fait même chargé de l'organisation professionnelle des traducteurs. Il fut président de la nouvelle association à trois reprises, et, disons-le, aux moments les plus critiques de son existence. ** Il en était devenu le conseiller juridique. Comme on peut le deviner, les problèmes liés à toute oeuvre qui s'édifie sont nombreux et divers: il y a des décisions importantes à prendre, des oppositions à vaincre, une orientation à assurer. C'est aux heures les plus difficiles peut-être de l'organisation de la profession des traducteurs, sur le plan national aussi bien que sur le plan provincial, que M. Boucher fut appelé à prendre en mains la réorganisation de l'association professionnelle. À ce titre, il sut toujours diriger les délibérations avec tact, imposer silence aux obstructionnistes sans les blesser, et conduire la société d'un pas assuré vers sa véritable destinée. ** M. Boucher était doué d'un jugement sûr. Surgissait-il des doutes dans l'esprit de certains confrères sur l'opportunité de tele ou telle ligne de conduite à adopter, M. Boucher savait toujours les dissiper, trouver la bonne solution et donner le coup de barre nécessaire. Quand il avait pris une décision, on pouvait être certain que c'était la bonne et qu'il n'y avait pas lieu de la modifier. En plus de son activité dans le domaine professionnel, M. Boucher a toujours activement participé aux mouvements nationaux, paroissiaux et sociaux. En 1956, il avait été président général des Sociétés Saint-Jean-Baptiste d'Ottawa. Il a été président de la succursale locale de la Société l'Assomption, de Moncton, et conseiller général de cet important organisme pendant de nombreuses années. Il l'était encore au moment de son décès, et avait même assisté à la réunion générale du conseil d'administration, à Moncton, au mois de février. ** Soulignons aussi qu'il a élevé une belle famille de cinq garçons et une fille qui sont tous passés par l'université et font honneur à leurs parents et à la patrie. Mme Boucher (née Alice Roux) dont le dévouement et les vertus familiales mériteraient plus qu'une mention passagère, est la soeur du personnage bien connu à la radio et à la télévision, Jean-Louis Roux. On peut dire que toute la vie de M. Boucher a été vécue en fonction de sa famille. Pour l'avoir élevée comme ils l'ont fait, au cours d'une période extrêmement difficile, M. et Mme Boucher ont dû faire des sacrifices presque héroïques, mais je suis certain que ces sacrifices, ils les ont consentis généreusement et dans l'optique des meilleures traditions religieuses. ** M. Émile Boucher est décédé le 12 mars dernier, à Ottawa, à l'âge de 64 ans. Avec son décès, disparaît l'un des maîtres de la traduction et de la linguistique, et un citoyen affable et distingué. (Source: Ephrem Boudreau, "Translatio", vol. II, no 1, 1973, p. 15-16.)