Bibliographies
Ungaretti, Giuseppe (1888-1970)
*Ungaretti a écrit que le vœu secret du poète était de laisser de soi "une belle biographie"; non pas une biographie "embellie", mais une oeuvre où l'essentiel d'une vie d'homme aura trouvé son épanouissement dans la parole. De fait, chaque étape de son oeuvre est étroitement liée à celles de sa vie. Ungaretti est né en exil, en Égypte où son père avait travaillé au canal de Suez (et mourut, miné par cette tâche, alors que Giuseppe n'avait que deux ans): le désert, les mirages, la mort auront compté parmi ses premières grandes expériences. À peine sa patrie découverte, en 1912, il se rend à Paris (les échanges avec la France - il épousera bientôt une Française - compteront toujours beaucoup pour lui). Vient la guerre, sur le front du Karst; à la fois la découverte de la fraternité et le heurt avec la réalité la plus âpre, d'où jailliront ses premiers poèmes, durs, concis et frais comme de la poésie archaïque, moment de vraie renaissance pour la poésie italienne. Les années vingt, à Rome et dans la campagne romaine, sont celles de la plénitude sensuelle, une sorte d'été où se renoue le lien avec le passé, la mythologie, la tradition: expérience qui s'épanouit dans son deuxième recueil, "Sentimento del Tempo". En 1937, Ungaretti part enseigner la littérature italienne à l'Université de São Paolo, où il restera jusqu'en 1942: découverte de l'exubérance tropicale, mort de son fils âgé de neuf ans, puis la guerre; années tourmentées dont un troisième livre, "Il Dolore", recueille l'essentiel. ** Revenu définitivement à Rome en 1942 et nommé professeur à l'Université, Ungaretti, dont la gloire commence à rayonner de plus en plus loin, va multiplier les voyages, surtout après la mort de sa femme, en 1958, et laisser rayonner dans ses derniers livres la déchirante lumière de l'automne et de l'hiver imminent.
Son oeuvre, avec celle de Montale et de Saba, domine le paysage lyrique italien de ce siècle. ** Ungaretti laisse également des essais, des proses de voyage et de remarquables traductions de Góngora, Racine, Shakespeare, Blake et Mallarmé. (Source: P. Jaccottet, "D'une lyre à cinq cordes", Paris, Gallimard, 1997, p. 178)